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27/11/2015

Interview de Regis Martin directeur de Solidarité Familiale à Toulouse pour évoquer la création et le fonctionnement d'un GEIQ (groupement d'employeur pour l'insertion et la qualification)


Pour mieux comprendre la réalité et les enjeux d’un groupement d'employeur pour l'insertion et la qualification (GEIQ), UNA a interviewé Régis Martin, directeur de Solidarité Familiale à Toulouse qui préside un GEIQ. Organisé sous forme associative, ce GIEQ compte six associations fondatrices issues du réseau UNA mais aussi d'autres fédérations ou non fédérées.

Pourquoi avez-vous créé un GEIQ ? Quelle est l'origine du projet ?

Avec la création d’un GEIQ, nous voulons dire que l'aide à domicile est un secteur en capacité de proposer des CDI, des postes pérennes. Le GEIQ, dont j'assure la présidence, a été initié par Toulouse Métropole emploi en 2014, pour faire face aux problématiques de recrutement de personnels qualifiés dans notre secteur de l'aide à domicile. On a souvent tendance à professionnaliser des compétences domestiques, je m'explique : je suis une maman qui a eu 4 enfants, donc je suis apte à garder des enfants, ce qui n'est absolument pas vrai. La démarche de professionnalisation dépasse le savoir personnel issu de sa propre expérience. Avec les contrats de professionnalisation nous bénéficions d’un véritable avantage : nous avons le temps de bien former la personne. A l'intérieur de la formation existe une partie tutorat qui permet de valoriser nos propres personnels. En identifiant nos personnels ressources, nous pouvons transmettre leur savoir, leurs manières de faire, les valeurs de l'association. Ce n’est pas une formation basée sur simplement la théorie et quelques stages pratiques mais une immersion à l’intérieur d'une association.

 

Comment fonctionne le GEIQ  ?

Le GEIQ recrute les personnels et les personnels sont ensuite formés dans le cadre de contrats de professionnalisation selon une organisation hebdomadaire: des jours de formations et des jours dans les associations. Aujourd'hui on est à 21 heures de mise à disposition dans la structure, c'est à dire 3 jours dans la structure et deux jours de formation théorique.

Tout au long du contrat de professionnalisation, il y aura des suivis et des bilans avec pour objectif de pouvoir accompagner la formation de nos futurs potentiels salariés et intervenants à domicile de nos structures.

Pendant les 10 mois de formation, les personnes acquièrent les connaissances théoriques et pratiques avec l'ambition de donner les savoir-faires et les savoir-êtres. Le fait d'avoir les personnes en immersion dans les structures permet de se familiariser avec les valeurs et orientations des associations pour avoir des salariés opérationnels à l'issu de leur formation.

D’un point de vue juridique, les personnes formées sont bien salariées du GEIQ et interviennent dans la structure d'aide à domicile via un contrat de mise à disposition conclu entre le GEIQ et la structure.

 

 

Combien de personnes bénéficient de votre GEIQ  ? Quels sont vos objectifs  ?

Aujourd'hui nous avons un groupe de 10 personnes en formation. L'objectif est de pouvoir faire deux sessions de formation durant l’année 2016.

 

Les personnels sont-ils affectés à une structure ou à toutes les structures membres du GEIQ ?

Cela dépend de l'option choisie qui peut être soit une multi mise à disposition, soit, comme c'est le cas avec Solidarité Familliale, une mise à disposition exclusive à la structure. Le recrutement implique le GEIQ et l’association. Le GEIQ sélectionne les candidats en fonction des besoins de la structure puis nos responsables de secteur reçoivent les personnes pour bien cadrer les choses et valider la candidature.

 

A l'issue de la formation des 10 mois, qu'advient-il du salarié  ? Son contrat s'arrête-il automatiquement  ? Doit-il faire acte de candidature auprès de la structure  ?

L'objectif pour la structure est de pouvoir intégrer les personnels à l'issue du contrat de professionnalisation. Il n'y a pas d'obligation à l'intégration dans la structure. La personne formée peut postuler ailleurs, elle dispose d'une liberté de choix totale. Pendant le temps du contrat de professionnalisation, l'enjeu est de pouvoir consolider l'apprentissage du salarié. Une fois le diplôme en poche, la personne formée peut aborder sereinement son intégration au sein de la structure. Nous sommes dans une logique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

 

Comment se déroule en amont le processus de recrutement du GEIQ  ? Quels sont ses relais  ? Dans quelle mesure prenez-vous en compte les parcours professionnels des candidats  ?

D'un point de vue concret, le recrutement est le fruit d'un travail en partenariat avec les associations. Le GEIQ recueille les attentes des associations en fonction de leur territoire et de leur spécificité. Riche de ces informations, il lance le processus de recrutement. Il échange alors avec les associations pour voir la personne la plus adéquate. Il faut voir que nous sommes dans une démarche d'insertion ou de réinsertion et il est important de bien cibler la personne pour éviter les erreurs. Il ne faut pas mettre le candidat ou la candidate dans une situation d'échec.

ne pas mettre le candidat ou la candidate dans une situation d'échec

 

Comme tous les acteurs de l'insertion le GEIQ a des partenariats avec d'autres acteurs comme Pôle Emploi ou les missions locales. Le GEIQ participe également à des forums. Sur notre GEIQ, nous disposions sur une première session d'une dizaine de place et nous avons reçu une quarantaine de candidature. Au niveau de notre association Solidarité Familiale, nous avons mis en place 3 contrats  : un sur l'accompagnement auprès de personnes en situation de handicap,  un sur l'intervention auprès des personnes âgées et un dans le cadre de l'intervention famille. Les profils sont sur des parcours et des volontés différentes.

 

Vous êtes vous même président du GEIQ. Quelles sont vos responsabilités en tant que président  ? En quoi différèrent-elles de vos responsabilités de directeur d'une association  ?

C'est la double casquette  ! Pour le GEIQ, le rôle du président est le rôle classique d'un président d'association loi 1901 qui se créer. Le GEIQ dispose d'une salariée responsable du GEIQ et le président se doit de l'accompagner dans les démarches nécessaires pour faire connaître et valoriser le GEIQ. Il l'accompagne également auprès des financeurs pour expliquer l'intérêt de développer ce type de dispositif. L'ambition est aussi de démontrer que les acteurs du domicile sont mobilisés sur la question de l'emploi et qu'ils sont capables de se mettre autour de la table et d'avoir une réflexion commune sur des besoins communs. Et on se rend compte que ça marche  ! D'autres GEIQ existent en France et fonctionnent très bien. Nous avons aujourd'hui des demandes d'autres associations en vue de rejoindre notre GEIQ.

 

Avez-vous été sollicités par des structures autres qu'associatives pour rentrer dans votre GEIQ (structure publique, société commerciale...)  ?

Le monde lucratif ne nous a pas sollicité mais le monde public nous a contacté. Pour les structures publiques, nous rencontrons un frein : les structures publiques sont rattachées au CNFPT et les structures associatives sont rattachées à Uniformation. Tout ne peut être mutualisé. Nous avons été aussi sollicités par des EHPAD. Si aujourd'hui notre GEIQ est très axé sur la spécificité de l’aide à domicile, cela nous permet de voir des opportunités de développement ou d'expérimentation.

Aujourd'hui vous êtes plutôt orienté sur les personnels ADVF mais envisagez-vous de développer une offre vers les personnels « santé » comme les aides-soignantes par exemple  ?

Sur notre territoire, nous avons identifié des difficultés sur les aides soignantes avec une pénurie de ce type de professionnels notamment pour les SSIAD. C'est un secteur tendu au niveau du recrutement. Pour les TISF, il y a peu de professionnels formés par rapport à la demande. La grosse demande reste sur les DEAVS. C'est une demande récurrente des associations : trouver des personnels formés.

 

 

Si le GEIQ fonctionne bien avec une valeur ajoutée pour les bénéficiaires, pour les salariés, pour la dynamique de l'association, des freins de financement ne risquent-ils pas d'apparaître du fait d'un grand nombre de personnels formés  ?

Effectivement, nous savons que nous sommes dans des cadres budgétaires très contraints avec un taux de formation également contraint si nous en restons à un strict cadre budgétaire et comptable. Si cela peut causer des soucis, nous sommes cependant dans le cadre d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Nous arrivons ainsi à gérer les personnels en fin de carrière. Ces derniers ont beaucoup de chose à transmettre, des choses très intéressantes comme: des méthodes de travail, un savoir-faire, un savoir-être et des valeurs fortes. Nous travaillons ainsi sur le passage de relais, le passage de témoin entre les anciens et les plus jeunes. Evidemment nos instances financières nous renverrons notre taux d'encadrement formé mais nous avons des choses à défendre.

transmettre un savoir-faire, un savoir-être

 

Est-ce que les membres du GEIQ ont des besoins différents  ? Un membre peut-il avoir des besoins bien spécifiques très différents d'un autre  ?

Nous avons des associations qui vont être spécialisées dans l’accompagnement du handicap, d'autres qui ont de très gros SSIAD, nous avons des associations qui balaye tout le champ médico-social...La première chose a été de trouver un consensus. ADVF ou DEAVS permet de regrouper le maximum d'association. Après nous avons les uns et les autres des besoins spécifiques. Actuellement le GEIQ mène une réflexion autour des aides-soignantes et des TISF.

 

Question pratique. Quel est le profil de la personne que vous avez recruté pour gérer le GEIQ  ?

Nous avons la chance d’avoir pu recruter une personne disposant à la fois d'un socle de formation RH et qui a travaillé précédemment dans le monde associatif. Véritable cheville ouvrière, elle doit connaître le monde de l'aide à domicile et de la formation pour trouver les financements parce que c'est le nerf de la guerre. Elle doit aussi arriver à travailler avec des administrateurs qui sont aussi directeur d'entité médico-sociale  !