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Précarité des métiers de l’intervention à domicile

La question de la précarité des métiers de l’intervention à domicile est régulièrement avancée :
 
·         temps partiels subis,
·         faibles rémunérations,
·         horaires atypiques.
 
Quelques grands traits caractéristiques de ces métiers, permettent d’expliquer les raisons et les risques de précarité qu’ils peuvent engendrer :
 
-          Profil type des intervenants :
 
o   Des métiers ultra féminisés, à l’UNA les femmes représentent 97% des salariés en intervention.
o    Des femmes relativement « âgées » au regard de l’ensemble de la population active : Dans la Branche de l’Aide à domicile, les salariés de 45 ans et plus représentent 48% des salariés. Cela ne va pas sans poser un certain nombre de problème en matière de maintien dans l’emploi, pénibilité et de prévention des risques professionnels.
 
-          Temps de travail : Derrière l’omniprésence du temps partiel, se cachent des situations assez variées.
 
La caractéristique du secteur pris dans son ensemble, est justement qu’aucune durée « standard » n’émerge réellement. Les durées très courtes côtoient des durées sensiblement plus longues.
 
o   Ainsi 28% des aides à domicile travaillent moins de 20 heures (y compris en tenant compte des autres activités éventuelles) durant une semaine de référence (8.5% moins de 10h),
o   31% entre 20 et 30 heures,
o   30.5% entre 30 et 40h
o    et 10.5% plus de 40h.
Selon la dernière étude de la DREES,
 
38% des intervenants déclarent vouloir travailler davantage (contre 30% pour l’ensemble des salariés selon la DARES, enquête Conditions de travail – 2005), signe que le temps partiel reste encore subi de façon importante.
 
En revanche, en distinguant les emplois relevant de l’emploi direct et ceux relevant de l’emploi prestataire, on remarque que la différence de durée du travail est très marquée et montre une vraie ligne de fracture : en emploi prestataire, la durée de travail dépasse aisément le mi temps.
 
A noter également que la durée du travail est directement corrélée au niveau de qualification : plus l’emploi est qualifié, plus la durée de travail augmente.
 
Ainsi, à l’UNA,
 
o   les agents à domicile ont une durée de travail moyenne de 64.6% ETP/salarié (alors qu’elle est de 58% dans la Branche de l’aide à domicile prise dans son ensemble),
o   les employés à domicile ont une durée moyenne de travail de 70.5% ETP/salarié (67% dans la Branche prise dans son ensemble),
o   et les auxiliaires de vie sociale ont une durée de travail moyenne de 77.9% ETP (75% dans la Branche prise dans son ensemble).
 
-          Intensité du travail : De façon globale, dans ces métiers, la journée de travail est en apparence assez courte et concentrée durant des périodes assez standards.
 
Si on se rapporte à l’étude DREES, relative aux intervenants auprès de personnes en situations de fragilité, intervenants qui constituent la très grande majorité des effectifs à UNA, elle est en moyenne de 4h09 en emploi direct contre 5h36 en prestataire, étalée sur 7h13 en moyenne.
 
Pourtant cette faiblesse des durées de travail s’accompagne d’une emprise du travail sur la journée parfois importante.L’amplitude quotidienne de la journée de travail des aides à domicile (temps écoulé entre le début de la première intervention et la fin de la dernière) apparait ainsi moins éloignée de l’amplitude moyenne de l’ensemble des salariés que la durée effective de travail, notamment pour les salariés en prestataire où ellede 7h51
 
et montre le décalage entre la durée des interventions et la durée de la journée de travail. Le poids et la localisation des « interstices » de hors travail dans la journée de travail distinguent les aides à domicile de la plupart des autres professions. La part de « non travail effectif » est en moyenne de 28%.
 
-          Prévention des risques : Les études de la CNAMTS soulignent le caractère plus accentogène de l’activité d’aide à domicile (en structure) comparée aux autres professions salariées. On compte 5.2 accidents de travail pour 100 salariés des structures d’aide à domicile contre 3.8 accidents dans l’ensemble des branches professionnelles (champ couvert par la CNAMTS). L’étude de la CNAMTS (2010) montre une « sur sinistralité » au sein de la population salariale des structures d’aide à domicile. En effet, l’indice de fréquence, le taux de fréquence et le taux de gravité sont respectivement supérieurs de 36,46, et 64% comparés à l’ensemble des secteurs d’activité.
 
-          Rémunération : Dans le secteur, les faibles temps de travail entrainent des salaires bas, le salaire médian est de 840 euros mensuels en 2008 pour les intervenants à domicile pris dans leur globalité, soit inférieur au seuil de pauvreté (954 euros mensuels), ce qui place ces salariés en position de dépendance vis-à-vis d’autres revenus du ménage, ou à défaut, en position de « travailleurs pauvres ».
 
L’INSEE estime que près de la moitié des salariés à domicile employés directement par un particulier occupent aussi un autre emploi et pour le 1/3 de ces salariés, l’activité chez le particulier employeur n’est pas leur activité principale, mais une source secondaire de leur revenu principal. Pour ce qui concerne les salariés d’UNA, l’augmentation du SMIC, si elle est bénéfique aux salariés, du fait de la non révision des grilles et de la non augmentation de la valeur du point fixée par l’Etat, a un effet d’écrasement des grilles et conduit de fait à un effet très négatif sur la carrière des salariés et leurs parcours professionnels.
 
 
Qui plus est, nombre d’intervenant à domicile sont des femmes seules avec enfants, en temps partiels, et on estime que près de 70% des salariés en intervention sont susceptibles d’être allocataires du RSA à UNA, soit considérés comme des travailleurs pauvres, et ce, malgré les temps de travail relativement important proposés.
 
Enfin, ce secteur permet une entrée tardive en activité et peut accueillir des salariés sans qualification (mais pas sans compétence) auxquels un parcours professionnel peut être proposé (Catégorie A, passage en B avec formation, puis catégorie C), parcours qui est contraint par les injonctions des financeurs afin de limiter les couts induits par la professionnalisation alors même que les situations des bénéficiaires le justifient de plus en plus. De plus, les salaires faibles et contraints rendent plus aigues les question d’annuités nécessaires à la retraite et du niveau des pensions.
 
 
Si les questions de précarité de l’emploi touche directement l’ensemble du secteur, il n’en reste pas moins que les avancées en matière de qualité de l’emploi ont elles été réelles et significatives pour l’emploi prestataire :
 
-          Selon une étude 2007 (service droit des femmes) : L’entrée dans le secteur associatif correspond à une stabilisation statutaire et professionnelle des salariés. L’entrée dans l’association met fin, pour la majorité des AD interrogées, à des parcours professionnels déstabilisés par un licenciement économique ou construits via soit la succession d’emplois temporaires soit l’enchainement d’emplois « fragiles «  (particulier employeur)
 
L’entrée dans une association prestataire permet de ne plus dépendre des ruptures biographiques des employeurs, de connaitre une stabilisation du parcours professionnel, mais aussi d’avoir un temps de travail augmenté, tout en se voyantreconnaitre des droits absents de la convention collective du particulier employeur.
-          Les durées du temps de travail sont en constante et régulière augmentation pour atteindre en moyenne à UNA aujourd’hui un peu moins d’un ¾ temps
-          Les CDI représentent plus de 96% des contrats en intervention
-          Les droits sont reconnus au travers d’une convention collective de branche qui apporte en sus une mutuelle à tous les salariés.
-          Le taux de contribution à la formation professionnelle est de 2,10% de la masse salariale brute dans la Branche de l’aide à domicile, alors qu’il n’est que de 0.15% dans l’emploi direct, et permet ainsi que soient engagées de réelles mesures de professionnalisation.
 
 
 
Lutter contre la précarité des salariés intervenant auprès de personnes fragiles, qui par leur fonction ont une fonction essentielle en terme de cohésion sociale, est une action qui peut ainsi porter sur plusieurs dimensions :
 
-          Une clarification des prestations qui peuvent être effectuées en emploi direct et emploi prestataire, les modalités de travail, les conditions d’encadrement et de formations ne permettant pas la même sécurisation en matière d’intervention auprès de personnes en situation de fragilité
 
-          Une reconnaissance de la professionnalisation en tenant compte de son cout dans une logique de valorisation de métiers qui restent encore associés à la sphère domestique.
 
-          Une réflexion autour de la reconnaissance de ces métiers en matière de pénibilité. Reconnaitre ces métiers en tant que métiers pénibles aurait également un effet en termes d’annuités nécessaires à la retraite et par conséquence un impact direct sur la santé des salariés âgés et l’accidentologie.
 
-          Une réflexion sur la notion de temps plein, les caractéristiques en matière d’amplitude horaire constituant un frein au développement du temps plein.
 
-          Une réflexion autour de la rémunération et de l’augmentation de la valeur du point afin de ne plus avoir d’écrasement des grilles salariales
 
-          Une prise en compte des caractéristiques de ces emplois, des attentes des employeurs, et des contraintes (notamment en matière de cout) dans le cadre de la mise en œuvre des contrats aidés afin qu’ils puissent constituer de véritables accès professionnels sécurisés et que le secteur ne soit plus considéré comme une seule variable d’ajustement de l’emploi, et relevant de l’Insertion alors que c’est un secteur professionnel en tant que tel et créateur de richesse comme de lien social
 
-          Une réflexion sur l’image des métiers : revoir les termes utilisés par les institutionnels pour évoquer les prestations afin que ceux-ci ne soient plus sexués, exemple : Aide Ménagère.
 
C’est bien le fait de travailler pour et au sein d’une structure, qui permet aujourd’hui d’offrir aux personnes un environnement global assurant la sécurité et une meilleure qualité de l’emploi (nombre d’heures proposées, Convention collective, formations, encadrement, médecine du travail…).
 
La question de la réforme globale de la dépendance doit aussi pouvoir prendre en compte sérieusement la question de l’emploi (de la rémunération à la pénibilité).
 
Le secteur ne peut plus seulement être considéré comme une variable d’ajustement de l’emploi (notamment au travers de contrats aidés).
 
La sécurisation du secteur dans son ensemble ne passe pas que par la sécurisation de l’emploi, c’est bien d’abord la sécurisation du secteur qui apportera celle de l’emploi et d’une certaine façon permettra d’aborder réellement et d’avancer positivement sur les questions de précarité qui sont réelles.
Cette dernière dimension doit donc être abordée de façon concomitante à la réflexion sur la réforme de la dépendance, de son financement, et de l’organisation des prestations.